Ce matin nous faisons nos adieux à Emlyn, Ny, Chris et Sylvain. Moment émotion. D’autres obligations professionnelles obligent nos scientifiques à partir, à regrets. Ils auraient bien continué les recherches dans ce bel éden.
Après un petit bilan des découvertes de chacun, quelques blagues, des au revoirs joyeux, des prières anti-cycloniques et quelques conseils avisés pour la survie du reste de l’équipe, les voilà de nouveau embarqués sur la pirogue. La remontée jusqu’à Beroroha prendra au minimum une journée.
Les premiers départs, piqure de rappel, nous amènent à penser que, pour nous aussi, les jours sont comptés.
La fatigue commence à se faire sentir, les maux de dos également accompagnés de quelques tensions au sein du groupe. La pluie, charmante compagnie lorsque l’on peut se mettre au sec, charge l’air en humidité (80% en moyenne). Les pluies de ces derniers jours, ont changé un élément essentiel de notre quotidien: l’eau. Mis à part le fait que celle que nous buvons devient de plus en plus foncée, le réel problème vient du fleuve Mangoky qui est monté en quelques heures de près de 3 mètres. Nous n’avions plus qu’un mètre de marge avant d’être inondé. La rivière derrière le camp a considérablement monté elle aussi et nous ne pouvons plus la traverser à pied à cause des potentiels crocodiles qui pourraient nous guetter. Catherine sera la première à traverser sur un bateau pneumatique. Aujourd’hui, elle trouvera 5 nouvelles espèces d’hépatiques et fera retentir son cri de joie. Adeline, elle, fourrera dans sa poche une nouvelle espèce de cercopides. Charlotte découvrira 5 nouvelles espèces de cochenilles et Pierre Olivier, un nouveau serpent et un caméléon.
Avec Evrard, nous partons en remontant la rivière à la recherche d’un endroit pour installer un camp avancé. A deux kilomètres du camp, nous dépassons Jean et Tsilavina qui travaillent au filet dans la rivière. Un peu plus loin, nous entrons dans une zone rocheuse de plus en plus entaillée par la rivière. Une sorte de long bief méandriforme terminé d’une cascade finit par empêcher la progression dans le lit du cours d’eau. Les parois sont lisses, l’eau profonde et le courant non négligeable. Nous longeons donc le canyon sur une petite vire aux couleurs vives. Nous avançons rapidement mais le plaisir de marcher sur du rocher n’est que de courte durée, nous retrouvons malheureusement juste au dessus une nouvelle zone sablonneuse. Après 4 heures de marche assez éprouvante, nous atteignons enfin la plus grande forêt du Makay. L’endroit est superbe, entouré de hautes falaises et très caractéristique de la région avec ces profondes fissures enveloppant la végétation. Les traces de feu sont présentes et toujours aussi désespérantes mais vu du haut, en contemplant cette immense étendue verdoyante, l’espoir de trouver quelques beaux recoins préservés est bien là. Après quelques instants de repos, nous repartons rapidement en direction du campement que nous atteindrons 2 heures après. En chemin, nous ramassons un poisson mort et nous réussissons à capturer un iguane orangé grâce à une technique de « lancer de t-shirt ». De retour au camp, l’iguane s’avère être le plus commun de la région et le poisson, un Tilapia. Autant dire : décevant!
Evrard rassemble tout le monde pour un briefing afin de décider du programme des jours suivants. Il nous reste 4 jours, la grande forêt paraît très intéressante mais la logistique et l’accès en refroidissent quelques-uns qui semblent satisfaits des abords du camp actuel et qui ont perdu du temps à cause des intempéries des derniers jours. Un groupe réduit partira probablement en expédition « légère » dès demain matin.
Ce récit du jour, un hors d’oeuvre à déguster avant mon repas du soir, en écoutant Glenn Gould ! Quel plaisir renouvelé chaque fois, merci !