Jeudi 11 février 2010
La nuit n’aura pas été des plus reposantes à cause de la chaleur mais quel bonheur de baigner dans cette nature et de laisser bercer ses pensées par les chants et les cris de milliers d’oiseaux, de grillons, de grenouilles et de lémuriens. J’adore ça.
Au matin, nous avons fait une bien belle promenade dans la forêt et nous avons donc découvert de nouvelles espèces diurnes cette fois. Des mangoustes, des Eulemur Fulvus Rufus et des Sifakas, les mêmes que ceux que nous avons observé dans notre canyon paradisiaque il y a près d’une semaine dans le nord du Makay. C’est aussi pour ajouter quelques images de ces espèces que nous sommes venus ici. Malheureusement pour moi, le parc de Kirindy est, du fait de la forte densité de lémuriens, le centre de recherche le plus prisé sur le comportement de ces adorables prosimiens. Et le résultat est que presque tous les Fulvus que nous avons observés portaient des colliers, ce qui sur les photos est du plus mauvais effet!
En milieu d’après midi, nous avons repris la route pour avoir le plaisir de passer au coucher du soleil quelques extraordinaires minutes éblouis par la beauté et la majesté des immenses baobabs de la fameuse allée du même nom. Le site est d’ores et déjà classé et géré par l’ONG Fanamby. Et comble du bonheur du photographe que je suis, il n’y avait pas un vazaha (blanc=touriste). Nous étions les seuls et j’ai pu réaliser ainsi tranquillement et sans gêne tous les clichés que je souhaitais.
Bonsoir,
Sans vouloir harceler, cette histoire de Wumba est fort intrigante. Surement les études anthropologiques et ethnographique pourra préciser les choses.
L’origine de cette population fait penser a l’histoire des Mikea au nord de Tulear qui ont apparemment fui pour les mêmes raisons.
Ca me fait penser aussi a un travail que j avais lu concernant les tsingy de Bemaraha, les vazimba et les kabijo ainsi que les kalanoro et leurs relations. Ce travail permet en outre de faire une transition sur le comment. Comment conserver la biodiversité, les dispositifs qui permette une certaine conservation ou a l’inverse qui ont échoués. Fort intéressant et très bien documenté, ci joint le lien que j’ai retrouvé (mais vous connaissiez peut être): http://vertigo.revues.org/2255 (c’est un article de Cécile Bidaud Rakotoarivony et Mialy Ratrimoarivony, « Terre ancestrale ou parc national ? entre légitimité sociale et légalité à Madagascar », VertigO – la revue électronique en sciences de l’environnement, Volume 7 Numéro 2 | septembre 2006, mis en ligne le 08 septembre 2006.)
Si je me souviens bien, Mme Ratrimoarivony a d’autres publis intéressantes.
Cordialement.
Bonjour
A la demande d’Evrard, voici quelques éléments que nous avons recueillis sur place à propos de ces fameux Wumbas. Ils n’ont rien à voir avec les Vazimbas, qui selon les récits peuplaient l’île à l’origine. Ces Wumbas semblent bien être des malgaches appartenant aux ethnies qui peuplaient la région du Makay au XIXème siècle qui ont fui devant l’avancée des colons. Ils se sont alors enfoncés dans les forêts et les zones les plus reculées de l’île, fuyant au maximum le contact avec les étrangers, se méfiant également des villageois. Ils ont alors repris un mode de vie proche de celui des chasseurs-cueilleurs mais se rapprochent des villages de temps à autre pour trouver de la nourriture. Ils vivent en groupes peu nombreux, probablement des structures familiales. Lors du séjour, nous n’avons pas observé leurs traces dans les secteurs que nous avons parcouru mais au village de Beroroha, nous avons croisé une femme, simple d’esprit pour les villageois, qui nous ont dit que c’était une Wumba qui avait maintenant rejoint le village.
Je pense qu’une enquête ethnologique doublée d’une analyse anthropologique (et en particulier génétique), pourrait nous en apprendre davantage.
Francis Duranthon
Bonjour,
Pour répondre sur l’orthographe du mot Wumba, je ne me souviens pas l’avoir vu écrit donc il se peut que nous l’ayons écrit phonétiquement et que ça ne s’écrive pas de cette façon. La prononciation du W se fait comme en anglais. Peut être y a t-il une lettre malgache plus proche de cette sonorité. Merci pour vos éclaircissements en tout cas, c’est fort intéressant.
En ce qui concerne la Dina, je ne permettrais pas de proposer une analyse pointue de l’efficacité de celle-ci. Je suis resté trop peu de temps dans ces villages du nord Makay. Mais si j’en crois les habitants, ils n’ont plus subi aucune attaque depuis qu’il ont mis cette Dina en place. Cela semble donc très bien fonctionner. Pour la faire respecter, ils ont recours à quelques hommes armés (un par village) qui se déplacent un peu partout, qui suivent les troupeaux parfois ou qui protègent les villages. Dans la partie nord, je ne saurais pas dire s’ils ont été volés ou voleurs, je penche plutôt pour la première solution. En revanche dans le sud, ils sont clairement volés et voleurs. Il y a une tension extrême entre les différents villages pourtant distants de seulement quelques kilomètres. Ils se volent les zébus réciproquement entre les villages de l’est Makay mais aussi avec les villages de l’ouest Makay tels que Mandabe. Nos porteurs ont fini par nous le dire en souriant comme s’il s’agissait d’un jeu, ce qui me fait penser qu’ils ne sont pas prêts d’arrêter. Mais sur le sujet, il est extrêmement difficile d’avoir des infos fiables, des réponses claires voire des réponses tout court. J’avoue que je ne comprends toujours pas vraiment comment cela fonctionne, ni pourquoi. Je souhaite y retourner bientôt et passer du temps dans les villages pour en savoir plus car je suis persuadé que les Dahalos sont ceux qui mettent le feu dans les endroits reculés du massif. En clair, ce sont eux qui sont en train de faire disparaître les derniers lambeaux de forêt primaire du Makay. Pour sauvegarder ces magnifiques montagnes, il faudrait donc commencer par trouver une solution au problème Dahalo dans la région.
A propos des entrées possibles dans le massif, elles sont nombreuses. Tous les cours d’eau notamment permettent d’y pénétrer par l’est comme par l’ouest. La partie centrale du massif à la latitude de Mandronarivo est notamment la zone la plus facile à traverser pour rejoindre Mandabe à l’ouest. C’est la partie Nord qui est la plus difficile à pénétrer. Nous avons été bloqué par de trop nombreux et trop difficiles canyons lors de notre traversée sud-nord en 2007 et cette fois en février 2010 lors de notre tentative descente du nord au sud, nous avons vite été freinés aussi. Il reste donc une zone que je n’ai pu que survoler et qui semble être totalement infranchissable. C’est à dire qu’il doit être possible d’en remonter les cours d’eau mais impossible de passer de l’un à l’autre.
Cordialement.
Bonjour,
Merci pour cette réponse extremement rapide pour l’occasion.
1/ Effectivement il y a peu de commentaires et c est fort dommage. On a tous les jours ou quasi des infos de La Boudeuse en Guyane ou de JL Etienne et de son ballon pour des pseudo découvertes ou tout au moins des sujets battus et rebattus, plus trop de place pour les autres hors de tout battage mediatique et c est dommage. Proposez peut etre votre récit au concours Libevoyages (réservé aux moins de 28 ans, je crois) pour un affichage sur un quotidien populaire.
2/ Le terme Wumba m’étonne d’autant plus que le w n’existe pas en langue malgache, a ma connaissance. D ou le rapprochement avec vazimba et la proximité des sons. Le terme m a d autant plus étonné que je ne l ai pas vu mentionné dans les études de socio ou anthropologues que j ai pu lire. Mais n’étant pas chercheur, juste curieux, j ai pu passer a coté.
Kinoly (genre de fantomes), kalanoro, beaucoup d histoires de petits etres qui vivent dans les grottes en foret et qui volent du riz ou autre chose. Bcp de monde en ont vu mais rarement ceux qui les cherchent. Peut etre les wumbas en sont une déclinaison locale.
Pour la prégnance du mystere a Mada, meme pour ce qui concerne les malgaches christianisés, voir sur youtube ou dailymotion, les videos du pasteur Mailhol et ses desenvoutements sur la piste de la montagne d’Ambondrombe pres d Ambalavao (un des sites majeurs de la culture malgache par ailleurs) par exemple.
3/ N’ayant pas d’éléments ni sur les recensements de vols, ni sur les Dina des régions que vous décrivez, je n en dirai pas plus. Je sais juste que le probleme est tres pregnant et selon plusieurs sources en augmentation depuis la crise institutionnelle que traverse Mada. Je pense toutefois que vos conclusions sont un peu expeditives sur les comparaisons entre Beronono et Malaimbandy en ce qui concerne la gestion des vols par ces différentes communautés : la Dina est elle si efficace ? quel est son principe ? est ce une zone de voleurs ou de volés ? ne serait ce pas une zone de rassemblement des dahalos etc etc… les gens de Beronono s entretuent ils ou sont ils tués par des dahalos qui viennent d ailleurs etc…
4/ Quand je vivais a Fianar, j entendais parler de russes qui avaient été explorer le massif par l est (Ikalamavony puis Fitampito puis le massif) pour y prospecter. Les paysans de l ouest de la matsiatra me ramenaient parfois du mercure qui suinteraient de certaines grottes de cette meme region.
N est ce pas un point d entrée possible ? comme c est une zone tres peu anthropisée, peur des dahalos entre autres, ne serait il possible pour vous de tester aussi ces voies qui doivent receler aussi des enclaves de biodiversité protégées (peut etre que les observations aeriennes vous ont permis de confirmer que non, je ne sais pas). Juste une idée comme ca, peut etre totalement absurde.
Encore bravo et bon travail
cordialement
ps : pas de probleme pour le reve en regardant le site, j en ai mon compte meme si j en demande encore
Bonjour Rotsaka,
Merci pour votre message qui mérite effectivement une réponse.
1/ J’aimerais beaucoup répondre aux messages mais pour l’instant, nous en recevons bien peu. Nous avons eu un problème qui a empêché les visiteurs de laisser des commentaires durant l’expédition. Voilà qui explique en partie le peu de commentaires.
2/ Il s’agit bien de Wumbas qui sont supposés vivre reclus dans les canyons du Makay. Les habitants des villages alentours disent ne les avoir jamais vus car les Wumbas ne sortiraient du massif que la nuit mais ces mêmes villageois nous ont assuré qu’ils avaient souvent remarqué des vols de riz ou d’autres denrées accompagnées de traces de pas de petites tailles. Nous avons posé de nombreuses questions à ce sujet aux villageois et l’anthropologue Francis Duranthon devrait pouvoir apporter quelques éléments de réponse sur l’origine et la réalité de ce peuple. Je vais l’inviter à vous répondre.
3/ Les tombes non fady dont nous parlons ne sont pas celles des Wumbas (qui ne seraient d’ailleurs probablement pas visibles) mais des Sakalava, ethnie habitant autrefois la région du Makay et qui a été chassée par les Bara.
4/ J’avoue que mon message « le dernier jour en brousse » était peut être un peu rapide et source de malentendu. Je sais bien que les Dina ne sont pas propres au village d’Ankerika et qu’elles sont utilisées dans tout le pays. Ce que je souhaitais souligner, c’est la différence de traitement du problème Dahalo entre les villages du nord Makay (Sakalava) et les villages du sud Makay (Bara). Les uns ont cherché à enrayer le fléau et il a suffit qu’ils décrètent une Dina pour le phénomène s’arrête. Alors que les autres continuent à se voler des zébus mutuellement et vont jusqu’à s’entretuer (un des jeunes du village de Beronono que j’avais embauché en 2007 comme porteur a été assassiné en octobre dernier à Beroroha). La bonne nouvelle, c’est qu’il existe au moins cette solution de la Dina. Encore faut-il qu’ils aient le désir d’arrêter.
5/ Je prends note de vos remarques concernant le site. Sachez que nous mettrons très vite le sujet ADN en ligne dans la rubrique le « coin des médias » et que si d’ores et déjà vous pouvez retrouver des photos et vidéos dans la rubrique « galerie », nous comptons bien dans les jours à venir offrir beaucoup plus de contenu visuel.
Merci encore pour ce message.
J’espère que nos images vous permettront de continuer de rêver.
Bien cordialement.
Bonjour,
Je vois que généralement il n’y a pas de réponses aux commentaires, ce qui peut être n’encourage pas a en envoyer. Dommage.
Trois petites remarques sur des points qui me paraissent inexacts ou tout au moins qu’il convient de préciser :
– vous parlez de Wumbas comme un peuple inconnu. Personnellement je n ai jamais entendu parler de ce peuple. N’est ce pas des Vazimbas dont vous auraient parlés les villageois ? Ces derniers seraient pour résumer des proto malgaches repoussés aux marches du royaume merina et qui auraient acquis un statut mythique malgré une base historique reconnue par bcp d’historiens. Il m’étonne que leurs tombes ne soient pas fady car bcp de fady sont associés à des vazimbas. La consonnance similaire me fait pencher pour le vazimba plus que pour le kalanoro, pour l’occasion mythique, hominoide légendaire type big-foot a la malgache.
– les Dina (conventions, mot malgache d origine arabe) sont courantes et la région de sakaraha a d ailleurs été le site d une dina d envergure dans les années 60. Mais des Dina sont régulièrement évoqués en cas de vols. Ce n est pas propre au site que vous avez traversé et les gens du sud du massif doivent etre au courant.
– Sakalava signifie plutot grande vallée ou large vallée que « nouveau » (source Lombard), c est la population de la cote ouest pour résumer largement.
Sinon magnifiques photos (mais pas assez) et textes malheureusement trop courts, on aimerait en lire plus. J’ai raté ADN hier soir, dommage. Je voulais voir plus d’images de cette région qui me fait rêver depuis près de 10 ans.
Bonne continuation.
Moi quand je serai grand je ferai comme Evrard, je serai aventurier. Sacha