Gaëlle Joubert a participé durant l’été 2019 à une mission écovolontaire avec Naturevolution. Cette mission s’est déroulée dans les villages du Nord Makay où le gestionnaire de l’aire protégée et les communautés locales ont décidés de construire à la fois une école et une pépinière doublée d’un potager dans le village de Tsiazorambo. Une mission qui restera gravée dans la mémoire des écovolontaires pour toujours … Récit.
Samedi 27 Juillet, 18h30. Il fait déjà nuit sur le village de Tsiazorambo.
Avec la majorité du groupe, nous sommes posés au campement, au bord de la rivière un peu à l’écart du village.
Voilà maintenant une heure que nous observons, dans la forêt aux abords du village, une lueur orange. Un feu de brousse. Cela ne nous surprend plus vraiment. Chaque jour depuis notre arrivée, nous observons des volutes de fumées au loin. On peut compter au moins 3-4 feux par jour. Mais il est vrai que celui là est particulièrement proche du village, et la nuit sombre fait ressortir ses lueurs rouges et oranges inquiétantes.
Le feu ne diminuant pas et semblant se propager, nous grimpons à la “Colline-Réseau”, pour avoir un meilleur aperçu de la situation. Cette petite butte derrière le village surplombe les environs, et offre le seul point d’où les téléphones arrivent à capter quelques barres de réseau. Perchés là haut, nous réalisons que le feu est plus étendu que nous le pensions. Il semble être né de trois départs différents, et malheureusement, le vent le pousse dans la direction de la nouvelle pépinière.
Au village, les chefs nous affirment qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter, un lit sablonneux sépare le feu de la pépinière. Nous ne sommes pas aussi convaincus: le lit fait à peine cinq mètres de large, et ses deux rivages sont bordés d’arbres.
Tout le matériel de jardinage est entreposé dans la pépinière. Le vent forcit. Rapidement, une file indienne se crée pour évacuer tous les outils et les graines, au cas où le feu viendrait jusque là. La tension monte d’un cran, et tout le monde est un peu inquiet de voir le dur labeur des dernières semaines partir en fumée.
Alors qu’il est l’heure de dîner, nous apercevons des ombres et des frontales au niveau du feu. Curieux, nous nous enfonçons dans la forêt pour les rejoindre.
Il s’agit en fait de Julienne, la nouvelle responsable de l’aire protégée du Makay, avec quelques villageois et plusieurs Vazahas (étrangers), déjà sur place pour combattre le feu. En effet, Julienne, dans le village, tout aussi inquiète que nous pour la pépinière, était allée chercher l’aide de qui voulait bien s’improviser pompier.
Devant le feu, la scène est impressionnante. Il fait chaud, des pans entiers de hautes herbes brûlent, de grandes flammes jaune et oranges dansent dans la nuit, des braises volent partout dans le ciel, … Et au milieu de cette vision irréelle, des ombres humaines ! Je n’ose pas en croire mes yeux au début, mais si, des ombres humaines au milieu du brasier, s’activant à taper sur les flammes.
La rivière est trop loin, et il n’existe évidemment pas de camion de pompier, ni de lances, ni de réserves d’eau utilisables pour éteindre le feu. Les malgaches ont une technique bien à eux : Ils tapent sur les flammes avec des grands branchages de bois vert.
Cette technique est déroutante au premier abord mais plutôt efficace contre ce type de feu.
En effet, ce sont surtout les hautes herbes qui brûlent en flambées impressionnantes, mais ne génèrent pas vraiment de braises chaudes. Le feu se répand à cause de ces grandes flammes. Une fois étouffées, la flambée ne se propage plus.
Au milieu de ce chaos, à aider comme on peut, à faire attention à ce que les jeunes éco-volontaires ne prennent pas plus de risques que nécessaire, le temps semble suspendu.. Sommes-nous restés au milieu des flammes deux heures, ou seulement trente minutes ? Impossible à dire.
Au bout d’un moment, tous les principaux foyers sont éteints, et il ne reste plus que quelques braises rougeoyantes et un sol noirci. Les malgaches sont déjà repartis, et nous restons un groupe de Vazahas à examiner les dégâts. La surface brûlée est bien grande, mais heureusement la pépinière est saine et sauve.
Un peu désorientés, dans la nuit noire, au milieu de la forêt à moitié brûlée, nous cherchons notre chemin pour rentrer au village. Nous tournerons en rond pendant une vingtaine de minutes avant de tomber sur la sauveuse de la soirée : Julienne, qui nous ramène au village, encore étourdis par la soirée que nous venons de passer.
La plupart des départs de feu à Madagascar ont lieu à cause de la perte de contrôle de feux allumés pour défricher, pour faire paître les zébus, pour brûler les déchets, ou malheureusement juste pour s’amuser…
→ Lire notre article sur l’origine des feux de brousse dans le Makay
Dans le cas de celui-ci, comme pour beaucoup, on ne sait pas vraiment. Après une petite enquête, on nous a dit « accident »… Le feu est tellement ancré dans la culture malgache qu’il est très dur de changer ces habitudes.
Nos outils pour combattre ce fléau ? Discuter, se mettre à la place des communautés locales, comprendre, proposer des alternatives puis agir ensemble pour améliorer les conditions de vies tout en préservant l’environnement.
Les conséquences du feu sur l’environnement (sécheresse, érosion, famine,…) a été un des grands enjeux du programme de vulgarisation scientifique abordé avec les enfants comme avec les adultes.
A l’aide de supports en bandes dessinés, les enfants ont appris : l’importance des arbres pour lutter contre l’érosion, le cycle de l’eau, la décomposition des matières végétales, les mécanismes derrière la sécheresse et la famine,… tant de notions nécessaires pour comprendre les conséquences des feux de brousses, et donc les raisons de protéger les forêts du Makay et de Madagascar.
Gaëlle Joubert
Participez au programme 1 million d’arbres pour le Makay
Pour aller plus loin, nous vous proposons de découvrir d’autres articles dédiés au phénomène de déforestation dans le monde et à Madagascar, et nos actions menées sur le pourtour de l’aire protégée du Makay :
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